not without you ☾ ren

escaping reality.

il était tard, cela faisait déjà une bonne heure que tout le monde était couché à l'appartement, tu n'entendais plus un bruit. depuis ton emménagement, il y avait de cela un petit moment, tu avais pris l'habitude de toujours rester dans ta chambre, de surtout ne parler à personne, jamais, et de ne surtout pas croiser du monde le soir, sans quoi tu cassais généralement l'ambiance. personne ne voulait de lune le psychopathe dans ses pattes, et tu les comprenais. mais récemment, il fallait croire que les choses avaient un peu changé, que l'atmosphère s'était détendue, que tu devenais de plus en plus humain. parfois, tu te flagellais mentalement d'être aussi faible, et parfois tu ne pouvais être que fier de tout le chemin que tu avais accompli, et de ce que tu étais devenu. tu avais appris mille et mille choses et pourtant il t'en restait encore plus à découvrir, d'autant plus sur les humains eux même. tu t'étais efforcé de te montrer un peu plus, d'être plus visible, d'être plus présent. pas toujours plus loquace, mais là, autrefois l'ombre qui les inquiétait, maintenant tu étais un ange pour veiller sur eux, c'est ce que tu t'évertuais à penser. ils comptaient tous pour toi, autant qu'ils étaient, même si tu n'avais pas nécessairement apprit à tous les connaître, tu savais qu'ils avaient la confiance de ren, et finalement rien d'autre n'avait grâce à tes yeux.

ren, oui. celui dont tu t'étais tant rapproché, ces dernières semaines, jusqu'au point de non retour, jusqu'au drame et finalement ... finalement tu ne pouvais qu'admirer ce que la psychologie humaine pouvait mettre en oeuvre pour se reconstruire, oublier, passer à autre chose. tout ce dont tu étais purement et simplement incapable, finalement.

ce soir là, tu t'étais relevé, sans un bruit, pour te poser sur le grand canapé, assis là où tu ne t'asseyais jamais. tu aurais pu prendre un livre, tant tu aimais lire, mais tu ne préférais rien prendre du tout, simplement profiter du bruit de la pluie fine contre les carreaux de la baie vitrée et du spectacle de polaris sous la pluie. c'était agréable, et tu n'avais pas sommeil. ces derniers temps, tu ne mangeais quasiment plus, encore moins que tu ne le faisais déjà, et tu ne dormais plus non plus. tu avais pensé à consulter l'un des médecins que plusieurs humains t'avaient conseillés mais tu avais eu trop peur qu'il lise en toi tout ce que tu n'étais pas. alors tu préférais t'abstenir, même de la présence d'un psychologue. si c'était pour qu'on te dise que tu étais une étoile, ou que tu étais dépressif, ça ne rimait à rien. toutes ces choses, tu les savais déjà. d'un côté, comment ne pas être triste de savoir que la vie sur cette terre ne se résume qu'à un petit siècle ? que tout ce que tu avais trouvé, tu allais le perdre, presque aussi fraîchement ? et les jours défilaient, les heures s'égrainaient, tu pouvais presque entendre les tic tac des horloges résonner dans ta tête.

jusqu'à finalement entendre le parquet craquer un peu, pas très loin, dans un coin de la pièce et fermer les yeux. c'était ren. tu connaissais sa façon de marcher, son odeur, sa présence, et puis il y avait toujours cette chose en toi, cet espèce de radar qui pouvait t'assurer où il était, où il n'était pas et comment il allait. c'était pratique, au moins autant que c'était terrifiant. tu essayais de le maîtriser, mais ça ne faisait que t'affaiblir un peu. peut-être que d'une façon ou d'une autre, ren s'était mis à se nourrir de ta force légendaire. et peut-être bien que ... d'une façon ou d'une autre, tu étais totalement d'accord pour le laisser faire.

tu n'arrives pas à dormir ?

tu connaissais ren, assez pour savoir qu'il n'avait pas une petite fringale nocturne, en somme. tu le connaissais assez pour savoir qu'il ne prenait plus le risque de sortir au beau milieu de la nuit, tu n'étais même pas sûr qu'il l'ait déjà fait. tu le connaissais assez pour sentir qu'il n'était pas au sommet de sa forme, mais tu savais aussi que finalement ... il n'était jamais vraiment au sommet, simplement toujours d'un côté ou de l'autre d'une pente glissante.

escaping reality.

les démons sont plus forts la nuit.

tu fronces légèrement les sourcils. tu comprends, tu ne peux que comprendre ce qu'il essaye de te dire, et puis tu hoches doucement la tête, tu souris brièvement. bien sûr que tu comprends. pendant de longues secondes, le silence retombe et tu te mets à observer ren du coin des yeux, à le détailler. tu le distingues plutôt bien, malgré l'obscurité. faut aussi dire que l'obscurité, ce n'est pas grand chose pour toi, tu y es habitué, c'est comme si tu vivais dans le noir depuis qu'althéo n'est plus.

et toi ? tes blessures vont mieux ?

tu hoches simplement la tête, légèrement, tu te contentes de peu de mots, c'est généralement ren qui fait la discussion. habituellement gêné qu'on te touche, cette fois ça ne te dérange pas, parce que c'est ren, que ren ne peut pas avoir de mauvaises intentions, que ren t'a sauvé la vie. quelque part, ton corps lui doit la vie, alors tu lui dois au moins ça. tu le laisse faire, même si tu suis ses doigts des yeux, au cas où. c'est plus fort que toi d'être méfiant, même s'il n'y a rien dont tu peux te méfier avec ren. il est transparent, tu vois à travers lui. ren n'est pas juste du verre, non, ren est un cristal, un diamant. il est plus précieux qu'il ne le pense, il ignore sa valeur.

tu devrais te reposer. ça guérit mais c'est mieux si on dort.
dans ce cas tu devrais dormir aussi.

tu répliques, presque aussitôt, pour lui souligner que si tu ne dors pas, c'est qu'il y a une raison. habituellement, tu te serais simplement tue, mais il faut croire que la présence de daesung doit t'influencer à parler quand ça ne sert à rien. tu soupires brièvement, et puis tu détournes les yeux. tu aurais bien aimé travailler ce soir, il n'y a rien de tel que le chapiteau rythmé par le bruit régulier et apaisant de la pluie. tu souris brièvement en imaginant les sourires des spectateurs, la prochaine fois que tu viendras. et puis finalement, tu songes au fait qu'il faudra bien cacher ton corps, cacher les cicatrices, à ces gens à qui habituellement tu ne dissimules pas grand chose. c'est nouveau, et tu n'aimes pas l'idée. mais bon, inutile d'inquiéter quelqu'un.

je ne dors plus.

plus vraiment, pas plus que quelques heures par semaines, tout au plus, de quoi reposer un peu ton corps fatigué. et puis tu déposes ta main sur celle de ren, pour l'empêcher de se balader plus loin, et tu entoures ses doigts pour les garder contre les tiens. tu as envie de souffler que tu ne peux pas dormir sans soleil, mais tu te retiens. tu ne sais pas si ça ramènera les images du traumatisme à ren, mais tu ne veux pas que ça arrive. il ne mérite pas ça. il mérite d'être en sécurité et en paix, simplement.

qu'est-ce que tu cherchais ?

tu demandes, tout bas, finalement. d'habitude si peu curieux, tu ne veux pas l'inquiéter. tu tentes même un sourire rassurant, mais il est minuscule, presque timide, c'est à n'y rien comprendre. il ne va rien comprendre. le pauvre.

escaping reality.

viens, je vais te montrer quelque chose.

et il tire sur ton bras, il t'entraîne dans sa chambre. c'est toujours comme ça avec ren, tout d'un coup il se lève et décide de t'entraîner quelque part, et toi tu te laisses faire. tu es sans doute curieux de ce qu'il te veut. et imaginez ta surprise quand il te fait asseoir, allonger et qu'il attrape sa guitare.

j'ai écrit cette chanson après...

tu fronces les sourcils, t'as envie de te relever et de partir, mais d'un autre côté non. tu ne veux pas pas. ren à sans doute besoin que tu l'écoutes, alors tu prends une petite inspiration, tu t'attends à ce que ce soit une épreuve, à ce que ce soit horrible. oh, tu ne doutes pas du talent de ren, et justement c'est bien ça le problème. mais tu tiens bon, tu le regardes jouer, tu écoutes. sun kills the moon. il n'a sans doute pas idée d'à quel point il peut avoir raison. il ne chante pas très fort, de toutes façons le moment ne s'y prête pas. tu es toujours impressionné par la poésie des humains, comme si tu étais une bonne inspiration, comme si tu les guidais toujours un peu plus dans la mélancolie. tu l'écoutes, tu savoures, même si ça fait mal, tu as l'impression de vivre encore, un peu, et c'est plutôt agréable.

lune. c'est pas ta faute. tu le sais, pas vrai ?

il s'est allongé près de toi, il vient d'approcher encore, tu soupires tout bas, tu voudrais bien lui dire que oui, tu sais, mais tu n'as pas envie de lui mentir ou d'entendre ta voix se briser. tu soupires faiblement en sentant les larmes rouler sur tes tempes. tu regrettes tellement de ne pas avoir eu le courage de lui parler, peut-être qu'il aurait laissé transparaître quelque chose, peut-être que tu aurais capté que quelque chose n'allait pas. peut-être bien, oui. peut-être ou peut-être pas. tu ne peux plus savoir. tu donnerais ta vie pour la sienne, elle est tellement plus importante. mais ce genre de choses n'arrivent pas.

althéo il aurait surement pas voulu que tu sois triste.

et puis, tu fronces les sourcils. il s'est souvenu de ce que tu as dit d'althéo, ou alors il t'a cru. le soleil, c'était un détail pour les humains, non ? pourquoi ren s'en est souvenu ? se pourrait-il qu'il sache ? tu repousses l'idée, tu ne veux surtout pas lui créer des ennuis, il ne vaut mieux pas qu'il sache.

ren... merci.

tu hésites à te relever et partir, sincèrement, mais tu as peur de voir tes jambes trembler sur le trajet, tant par l'émotion que par la fatigue. tu penches la tête pour l'observer, tombant les yeux dans les yeux, et tu restes de longues secondes à le dévisager. ce n'est plus la peine d'honorer althéo, il n'est plus parmi vous désormais. il faut que tu tournes la pages, mais tu ne sais pas faire. c'est ton premier vrai décès, la première personne que tu perds et qui compte tellement pour toi. tu te sens démuni, perdu au milieu de l'océan.

et ce moment là que ton corps choisi pour luire. vraiment. faiblement, de milliers de petits points sous ta peau, comme l'astre que tu étais, depuis la terre. tu te crispes un peu, espérant que ça s'arrêtera avant que ren ne s'en rende vraiment compte, mais il n'y a aucune chance, pas vrai ? alors tu baisses un peu les yeux, terrifié à l'idée de l'inquiéter lui, terrifié à l'idée qu'il décide de te repousser, de hurler ou de demander des explications. c'est bien la première fois que t'as une boule au ventre pareille.

escaping reality.

tu mentais pas. t'en es une aussi.

entre temps, lorsque tu as vu sa réaction, tu as cessé de respirer un moment, et puis tu attendais simplement qu'il panique, qu'il pleure, peut-être, qu'il te repousse, sûrement, qu'il te menace, aussi. mais non. il ne fait rien de tout cela, comme quoi ren ne cessera jamais de t'étonner. ren reste là. il reste calme, il est fasciné, et tu es terrifié. il attrape doucement ta main et la lève devant vos deux visages.

j'ai jamais vu d'aussi belle lumière.

quelque chose dans ta tête te souffle de lui dire que c'est lui la véritable lumière ici, que c'est lui qui passe son temps à remonter le moral des autres, que c'est lui qui mérite l'attention qu'il est en train de te porter, que c'est lui qui mérite d'être aimé et chéri, mais tu ne dis rien, parce que ce n'est pas ton genre de dire ce genre de choses. et pourtant, ça te démange. tu ne sais pas comment lui faire comprendre que ... tout ce que tu fais, ces derniers temps, tes nouvelles résolutions, tu ne les dois qu'à lui, qu'à ren. tu connais bien des mots mais aucun ne te vient, aucun ne te semble juste. alors tu soupires doucement, resserrant ses doigts contre ta main, alors que tu glisses la deuxième contre sa main pour l'entourer, la protéger.

c'est grâce à toi.

un bref silence s'allonge, tu décides de t'expliquer un peu.

notre lien récent m'a fait réaliser beaucoup de choses. tu m'as donné envie de raccrocher du métier que je faisais. tu m'as donné envie de passer plus de temps avec vous, de faire attention aux autres.

nouveau silence, tu penches la tête pour le détailler un long moment, tu respires à peine, un peu anxieux qu'il comprenne mal ou prenne peur.

tu m'as donné envie de m'intéresser à toi, de faire attention à toi.

tu aimerais savoir s'il a conscience du lien entre vous, si c'est juste de ton côté, tu ignores comment le lui faire comprendre alors tu perds un peu contenance.

je... il y a un lien entre nous. c'est nouveau, c'est ... depuis althéo, je crois. j'ai l'impression de te connaître par coeur, et de comprendre ce que tu ressens. ça me donne simplement encore plus envie de veiller sur toi.

mon dieu, il va te prendre pour un fou, toi qui n'a jamais autant parlé près de lui, pour quoi va-t-il te prendre maintenant ? tu n'en sais rien mais tu t'efforces de simplement garder la face pour ne pas t'effondrer sur toi même. tu as presque réussi à balancer tout ce que tu avais sur le coeur, aussi maladroitement que ça puisse être, alors autant aller au bout des choses.

tu comptes énormément pour moi, ren, même si ... je ne sais pas te le fais comprendre, sache le.

tu te remets à l'observer, silencieux, tu le scrutes désespéramment pour t'assurer qu'il comprenne, t'assurer que vous soyiez sur la même longueur d'onde mais clairement t'en as la boule au ventre. ce moment est magique, d'acccord, mais combien de temps va-t-il le rester ? combien de temps allez vous être aussi proches ? ce n'est même pas fini mais tu as l'impression que ce ne sera jamais pareil, et ça te manque déjà.

escaping reality.

ren vient de t'embrasser. ren vient de t'embrasser est c'est comme si tu l'avais senti, comme si tu avais su qu'il allait le faire. comme si tu avais établi un campement au creux de son coeur et que tu écoutais chaque battement. ren vient de t'embrasser et tu as aimé ça, d'une certaine façon. peut-être de la même que lui. peut-être que ses sentiments sont plus forts que les tiens, alors ils les écrasent. peut-être bien qu'il s'agit un peu de ça, tu ne saurais dire. mais le baiser te semble si pur, si tendre, si court aussi. sans mentir, il se recule et tu fronces les sourcils, tu rouvres les yeux, tu le détailles, sans comprendre réellement ce qui vient de se passer. c'est nouveau sans être nouveau. c'est nouveau de le ressentir dans sa tête, dans son coeur. c'est nouveau de n'y rien comprendre, de ne pas pouvoir rationaliser comme tu as l'habitude de le faire.

ren est en train de te rendre fou.

pardon.

tu fronces les sourcils, il relève les yeux vers toi, tu les accroches, de peur qu'ils ne s'enfuient encore.

pardon mais tu...

tu quoi ? tu n'en sais rien, tu ressens ses émotions, tu n'entends pas ses pensées. tant mieux sans doute. tu essayes désespérément de faire le tri entre ses émotions et les tiennes, mais c'est comme si les siennes étaient plus agréables, plus faciles à appréhender, plus confortables, comme si elles effaçaient les tiennes, qu'elles les écrasaient. il n'a pas compris ce que tu étais en train  de lui dire, maintenant tu en es persuadé. il ne doit sans doute pas ressentir le lien de la même façon mais tu ne saurais dire si ça te déçoit ou si ça te rassure, si ça te fait plaisir de le voir dans cet état. oh ren...

je crois que je t'aime trop.

c'est étrange d'entendre ça de la bouche de ren, à toi. c'est étrange de le voir s'en vouloir, de le sentir désolé alors qu'il caresse ta joue qui frissonne sous ses doigts. il sait probablement que c'est plus compliqué que ça, il sait que tout vous oppose, il sait que tu te raccroches à lui comme à son nouveau soleil. il le sait probablement sans le savoir. il doit s'en douter, il n'est pas idiot, il est loin de l'être. tu t'en persuades en tout cas. et puis, tu approches doucement, pour déposer un baiser contre son front, tu poses tes doigts glacés contre son cou, puis dans sa nuque et tu le ramène à toi sans lui laisser le choix de pouvoir s'enfuir. tu veux juste t'assurer qu'il est là et qu'il va bien.

oh ren... tu en souffriras tant.

ren ...

tu n'as pas compris, et comment t'en vouloir ?

je reste à tes côtés, quoi qu'il arrive.

tu promets, tout bas, reposant tes yeux sur la pluie qui tape doucement contre les carreaux de la fenêtre, tu restes silencieux à nouveau, tu as sans doute déjà trop parlé. tu ne peux pas lui en vouloir de ce qu'il a fait et tu ne saurais le faire. au contraire, tu...

merci.